• Il n'y a pas de fête sans feu / Fogones que invitan a festejar

    Je rêvais de passer un jour de l'an différent. Un jour de l'an dans un endroit qui sorte de l'ordinaire. Un endroit sauvage au milieu de la nature infinie. J'avais balayé toutes les destinations les plus tropicales de l'Argentine: le parc naturel de la Palmeraie à Entre-Rios, les marécages d'Iberá, n'importe quel parc national de la Mésopotamie, entre les rivières Paraná et Uruguay. Les moustiques et la chaleur intense de l’été ont eu raison de ma décision. Les circonstances m'ont finalement amenée dans un petit coin perdu de la province de Buenos Aires,  au nom étrange et évocateur: Punta del Indio la pointe de l'Indien. Lieu de villégiature dans la Pampa humide, sur les rives du Rio de la Plata, moins exotique à première vue. Pourtant durant ces quelques jours j'ai touché du doigt l'essence de l'identité rioplatense.

    Soñaba con pasar un Año Nuevo diferente. Un Año Nuevo en un lugar fuera de lo común. Un lugar en medio de la naturaleza. Había barajado muchos destinos " tropicales "de la Argentina: El Palmar en Entre-Ríos, los Esteros del Iberá, cualquier parque nacional por la Mesopotamia...
    Los mosquitos y el intenso calor del verano echaron abajo esta decisión. Y finalmente las circunstancias se dieron así: llegué por casualidad a un rinconcito de la Provincia de Buenos Aires, con un nombre extraño y poético. Punta del Indio. A las orillas del Río de la Plata, en la Pampa, menos "exótico" a primera vista. Sin embargo, allí encontré un trocito de identitad rioplatense durante esos días.

     

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    IL N'Y A PAS DE FÊTE SANS FEU

    Me voilà donc partie camper avec des copains sur le terrain de la famille de l'un d'eux dans ce “village”. Entendez plutôt une espèce de grand bois quadrillé par des rues en gravier, avec quelques maisons dispersées ça et là. C'est dans l'une d'entre elle qu'est organisée la soirée de la Saint Sylvestre, chez les amis des amis de je ne sais qui... Bref, maintenant je ne cherche plus à comprendre; les choses fonctionnent comme ça. Les amis des amis des amis sont les bienvenus, reçoivent l'abrazo de rigueur à leur arrivée, et sont invités sans chichi à se réunir autour du brasier qui trône dans le jardin. Car ici , il n'y a pas de fête sans feu...
    A la lueur de quelques lampions, dans la clarté ondulante des flammes se crée une ambiance intime, chaleureuse et rassurante qui prête aux confidences. On se sent plus proche de celui ou celle que l’on connaissait à peine il y a quelques heures. 
    Et puis bien-sûr il y a la viande. Comment l'oublier… En de telles circonstances -nous sommes une trentaine de convives-  un agneau entier et une moitié de boeuf ne sont pas de trop. Ce sont les mets réservés pour les grandes occasions. L'équivalent argentin de notre bloc de foie gras.


    Bruno el asador
    Le vrai héros de la soirée s'appelle Bruno. Alors que tous les invités s’amusent, absorbés par des conversations animées, lui est chargé de la mission la plus sérieuse de toutes: c'est le maître du feu, el asador. Durant toute la nuit, il s'affaire autour des braises, torse nu, suant à grosses gouttes. Il s'affronte à la chaleur des flammes. Il surveille patiemment la cuisson, attentif à alimenter le foyer avec de nouvelles bûches. A l'aide d'une pelle- on sent l'objet technique spécialement conçu à cet effet, non pas un outil de jardin improvisé - il s'occupe de répartir les tisons sous le grill ou en demi-cercle devant le mouton a la cruz. (Cette manière de cuire l’animal planté sur un piquet, toutes pattes ouvertes, est typique des zones rurales argentines.  Âmes végétariennes s'abstenir!)


    Je suis curieuse de ce travail de l'ombre. Je décide de l'accompagner dans sa tâche solitaire. Il est bien sûr très occupé, ne quittant jamais de l'oeil le foyer tandis qu'il répond à mes questions. “L'agneau, on l'a mis trop tard, vers 19h. Il est déjà 21h. Il faut bien 4 ou 5h de cuisson. C'est ça la recette. “
    Je ne me surprends pas tant que ça. On m'a déjà expliqué que le secret de la viande argentine est tout simple: des heures et des heures de patience. Je réponds d'un air entendu. Mais avec l'estomac vide je songe que 5h tout de même, c'est bien long...

    Bruno est du village voisin un habitant de la Pampa, d'une race pas si perdue d'homme de la terre, rustique et  rude, gardienne des valeurs et des traditions. Malgré les grosses gouttes de sueur, malgré la difficulté de la tâche en cette chaude nuit d'été, ce n'est en rien une corvée pour lui. Quelques semaines auparavant, il était question de ne pas faire de grillade, faute de volontaire dans le rôle de l'asador (et moi qui était enthousiasmée à l'idée de voir en vrai l'agneau crucifié).  Mais, m'explique-t-il, de toute façon on allait faire un feu, alors je me suis dévoué. Même sans grillade c'est possible?  Bien-sûr, surtout à la campagne le feu ne peut pas manquer lorsque l'on se retrouve ensemble.  Et c'est vrai que la flambée crée un moment de grâce, quasi mystique entre les êtres, un moment pour la communauté. 


    A minuit, la viande est fin prête pour être servie: enthousiasme général. Un aplauso para el asador! L'homme de la Pampa reçoit les vivas et les hourras de ses compatriotes qui savourent entre deux morceaux de pain cette chair goûteuse, étonnement tendre et fondante.


    A minuit, la musique, un peu de cumbia...
    Tout le monde célèbre cette nouvelle année qui commence. Les nombreux musiciens- Bruno se révèle être aussi un percussionniste invétéré-  s'en donnent ensuite à coeur joie. A 4h ou 5h du matin, nous dansons toujours sur un candombe endiablé (rythme uruguayen aux origines africaines).


    Aux alentours de 6h du matin, il est temps de partir à la plage voir le soleil se lever sur le Rio de la Plata. Beaucoup de nuages, le spectacle n'est pas celui attendu. Mais qu'à cela ne tienne, certains, les plus courageux,  - qui ne sont en réalité que deux-  en profitent pour prendre le premier bain de l'année.


    Alors que je retrouve un moment de solitude après tous ces échanges créés, ces  liens ébauchés autour des flammes, je me demande ce qu'aurait été le réveillon sans la flambée... Effectivement, au-delà de la présence de l'Asador, le véritable protagoniste c'était lui, c'était le feu...

    Les jours suivants, il est toujours là et grâce à lui se révèle l’essence de la vie argentine: la communauté. Pour chauffer l’eau du maté que l’on partage au petit-déjeuner, pour créer encore de nouvelles expériences gastronomiques... Un poulet en sauce dans une espèce de marmite à pied, les “barquitos”,  poivrons grillés cuits avec un oeuf à l’intérieur .

     

    Facundo et Nicolás nous accompagnent avec leur guitare. Le premier surnommé affectueusement “el Colo” (de “colorado” car il est roux) est né et a grandi à quelques kilomètres de Punta Indio. Si son activité de musicien professionnel l’a amené à vivre dans la capitale, il n’en reste pas moins un artiste au style du "campo". Entre la sophistication de sa formation académique et la simplicité de la terre, il égrène les classiques, les chansons populaires, tristes mais pleines d’espérance. Il joue mélancoliquement face aux flammes, comme pour lui-même, et dans les accents de sa guitare se devinent les veillées des gardiens de troupeaux , la solitude de la Pampa et l’immensité infinie des plaines.

    Nico, quant à lui, est le guitariste urbain, portègne par excellence, originaire des quartiers Sud de Buenos Aires, tout comme le tango. C’est d’ailleurs un genre qu’il maîtrise à merveille, mais certainement que cela n'a rien à voir avec ses origines car il excelle aussi dans la samba brésilienne. Son style est celui du baladin, qui joue debout et promène ses chansons. Il passe de l’un à l’autre des convives et invite chacun à reprendre en choeur le refrain, avec son regard perçant. Personne n’échappe à ses yeux hypnotiques: sans savoir pourquoi on se surprend déjà à fredonner un air, sans même connaître les paroles. “los años de la infancia pasaron, pasaron… nananana  pedacito de cielo…nananana nanana”

    Feu de bois, musique, guitarres. Voilà comment j'ai changé d'année, près du Río de la Plata, au coeur de la Pampa. Comme dit une très belle chanson populaire, très connue dans le répertoire populaire argentin, je crois que de ces quelques jours je garde "milles chansons comme du petit bois sec, souvenirs de feux et de veillées qui invitent à matear" (prendre du maté).

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     FOGONES QUE INVITAN A FESTEJAR


    En Punta Indio, acampo con un grupo de amigos más o menos conocidos en el terreno de la familia de uno de ellos. En vez de pueblo (muy lejos de la idea que yo me puedo hacer de este concepto) me encuentro más bien con un especie de bosque “a cuadros” dividido por calles de ripio, y salpicado de algunas casas. Precisamente, la fiesta de Nochevieja  está organizada en una de esas casas, que pertenece a uno de los amigos de amigos de no sé quién. En fín, a estas alturas de mi vida en Argentina, dejé de  hacerme este tipo de preguntas y de sentirme incómoda por pasar una velada en casa de desconocidos o de desconocidos de mis conocidos. Acá las cosas son así: los amigos de los amigos son bienvenidos, reciben un fuerte abrazo a su llegada y están invitados sin formalidades a reunirse cerca de una fogata en medio del jardín.

    La luz de las llamas crea un ambiente íntimo, cálido y tranquilo. Ya te sentís más cercano de quién apenas conocías unas horas antes. Y luego obviamente está la carne. ¿Cómo no? En tales circunstancias –somos unos treinta invitados– un cordero entero y la mitad de una vaca no sobran. Son los manjares reservados para las ocasiones especiales. (En Francia, el equivalente sería el foie gras, un paté de oca.)



    El verdadero héroe de la noche se llama Bruno. Mientras todos se divierten, charlan y se ríen, él se encarga de la tarea más seria: es el asador, el maestro del fuego. Durante toda la noche, se dedica a mover las brasas, sin camisa, sudando. Se enfrenta al calor de las llamas. Supervisa con paciencia la cocción de la carne, atento a añadir leña a la fogata cuando sea necesario. Con una pala – se nota la herramienta técnica especialmente pensada para esto, no cualquier pala encontrada en el fondo del jardín- reparte las ascuas debajo de la parrilla o delante del cordero a la cruz (es decir clavado en una estaca con las piernas abiertas.) Me llama la atención su labor, apartado de los demás. Decido acompañarle en su tarea solitaria. Está obviamente muy ocupado: mientras contesta mis preguntas, siempre tiene el ojo encima de la fogata. " El cordero lo pusimos un poco tarde, a las 7. Ya son las 9. No vamos a cenar antes de las 12. Se necesitan 4 ó 5h...  Esa es la receta. " No me sorprende tanto: ya me explicaron que el secreto de la carne argentina es la paciencia. Asiento. Sin embargo, con el estómago vacío,  pienso que 5 horas no deja de ser muy largo.

    A pesar del sudor, a pesar de lo difícil de la tarea en el calor de verano, no le resulta un fastidio. Bruno es un habitante de la Pampa, de una raza escasa pero no tan desparecida de hombres de la tierra, de guardianes de las tradiciones. Las semanas anteriores, al organizar la fiesta, se había abandonado la idea de la parrilla, por no tener voluntario en el papel del asador. Pero, me explica él,  de todos modos se iba a hacer fogata, entonces dije que iba a encargarme yo. ¿Fogata sin carne? ¿Es posible? Claro, acá es así, sobretodo en el campo, no puede faltar el fuego cuando te reunís con amigos.

    Y es que los fogones invitan a festejar... ¿Quién lo negaría?

    A medianoche, ya está todo listo para comer. Alegría compartida entre todos ¡Un aplauso para el asador! El hombre de la Pampa recibe las felicitaciones de sus compatriotas que disfrutan de esta carne sorprendentemente tierna, sabrosa por las largas horas de cocción.

    A medianoche, también suena la cumbia....
    Todos celebramos el principio del año. Los numerosos músicos – Bruno está en todas: también es percusionista- dan riendas sueltas a la improvisación y a las 4 o 5 de la mañana seguimos bailando un candombe enfurecido ( ritmo uruguayo de origen africano ).
    Sobre las 6 de la mañana, es hora de ir a la playa a ver el amanecer sobre el Río de la Plata. Está nublado y el espectáculo no resulta tan lindo como lo esperábamos, pero no pasa nada: algunos - pero sólo los más valientes, en realidad sólo dos-  aprovechan para darse el primer chapuzón del año.

    Cuando ya vuelvo a mi soledad después de todas estas charlas, de estos vínculos esbozados a la vera de las llamas, me pregunto lo que hubiera sido la fiesta sin el fuego... Más allá de la presencia del asador, el verdadero protagonista era ella, era la fogata. 

    Los días siguientes, gracias a ella se revela lo que constituye la esencia de la vida argentina: la comunidad. Para calentar el agua del maté que se comparte en el desayuno, para crear nuevas experiencias gastronómicas… Pollito en salsa al disco, una especie de olla grande con pie, o barquitos son morrones (o pimientos) a la parrilla con un huevo dentro.



    Facundo y Nicolás nos acompañan con la guitarra. El primero, apodado cariñosamente “el Colo” ( por su pelo colorado, pelirrojo ) nació y creció a unos pocos kilómetros de Punta Indio. Su actividad de músico profesional lo llevó a vivir a la capital, pero no deja de ser un artista “estilo del campo”. Entre la sofisticación de la academia y la sencillez de la tierra, va sembrando en la noche canciones populares y música folklórica. Se sienta melancólicamente frente a las llamas, ensimismado, y en los acentos de su instrumento se vislumbran las fogatas de los gauchos, la soledad de la Pampa y la inmensidad infinita de sus pagos.

    Nico en cambio es un artista urbano, el porteño por excelencia, nacido por los barrios Sur de Buenos Aires, como el Tango. Es un género que controla perfectamente, pero no será por sus orígenes porque también sabe de sambas brasileiras. Toca de pie y parece que pasea sus canciones. Se desplaza en medio de su público y mira a cada uno a los ojos para animarle a cantar… Nadie escapa a su mirada hipnótica y sin saber cómo, una se sorprende canturreando un tema sin siquiera conocer la letra, como este vals.  “los años de la infancia pasaron, pasaron… nananana  pedacito de cielo…nananana nanana”

    Fogata, música, guitarras... Así cambié de año, en Punta Indio, cerca del Río de la Plata en medio de la Pampa. Y  creo que, como dice una hermosa zamba,  de estos días "traigo mil canciones como leñitas secas recuerdos de fogones que invitan matear".

     

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  • Commentaires

    1
    Marlene
    Mardi 9 Février 2016 à 21:01

    Une bonne annee alors, qui a si bien commence...amis, musique et delice...mmmmh!

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