• LE SUPER POUVOIR DE LA PARRILLA

    Moi qui n'ai jamais vraiment été carnivore, me voilà attablée à un restaurant pour una parrilla de carne, tradition argentine oblige...

    Un soir d'été à Buenos Aires. Envie de viande... Dans le genre steak frites. Finalement je me laisse tenter... une parrilla pour deux. Le mini-grill avec les braises brûlantes est posé sur la table, accompagné du plat de frites dont j'avais tant envie. Le monticule de viande cuit toujours et la graisse sur le feu laisse échapper un crépitement joyeux et inégal.


    " Chut, chut écoute!  es el canto de la carne... "


    LE SUPER POUVOIR DE LA PARRILLA

    Bienvenue en  Argentine! Quand je plante le couteau dans les premières bouchées, je m'attaque en réalité à une institution de la culture gastronomique du pays. Et il s'agit d'un repas en lui-même car la parrilla comprend un assortiment de morceaux qui doivent être mangés dans un ordre bien précis. On commence par les "achuras".

     -Le chinchulín mmmh... c'est mon préféré, m'explique mon initiateur argentin.

     Je souris de son enthousiasme, amusée par ce nom qui m'est inconnu, car inusité en Espagne, et dont la sonorité ne m'inspire que tendresse et affection. Chinchulín... pourrait avoir comme équivalent français disons... chouchoubidou… -Les Argentins auraient-ils développé un attachement  si particulier à leur grillade au point de lui donner des petits noms amoureux?-

     Je me penche sur la fourchette qui me tend le fameux morceau. Cela ressemble à un calamar frit. Mon sourire se transforme alors en une drôle de moue quand je reconnais la forme de la seconde " entrée " . Un ovale sombre comme un gros haricot: serait-ce.... un rein? Le goût est pourtant assez fin et rappelle un peu le foie. Le chinchulín frit est quant à lui un peu gélatineux, mais avec une saveur assez forte et marquée en final de bouche.

    Achuras, chinchulín...  Ah ! Comme la musique d'un nom est un joli emballage pour une réalité bien plus triviale! Laissons le dictionnaire de la Real Academia Española vous annoncer la nouvelle:

    achura.
    (Del quechua achúray 'repartir').
    1. f. Arg., Par. y Ur. Víscera comestible de una res. U. m. en pl.
    chinchulín.
    (Del quechua ch'únchull).
    1. m. Arg., Bol. y Ur. Intestino delgado comestible de ovinos o vacunos.

    Oui, vous l'aurez bien compris, malgré une authenticité indéniable -les origines quechuas le prouvent -  il s'agit ni plus ni moins que des abats, des tripes et des rognons!!!

    -N'y aurait-il pas de la viande plus normale? finis-je par demander timidement, un peu écoeurée par cette forte odeur à tripaille.

    Et je passe donc au "plat de résistance ": les côtes. Non pas coupées dans la longueur mais dans la largeur, ce qui implique un minimum d'os et un maximum de viande. Question saveur rien à dire. L'ensemble est tout de même très gras. Et cette friture crépitante transporte toujours ces relents d'intestins...

    Les frites tant espérées ne font en fait qu'en rajouter davantage. Ici ce n'est pas un steak/frites mais une parrilla/salade que l'on commande et cela se justifie totalement, je le comprends désormais.

    Cependant, cette viande... quelle viande!  La voilà dans toute sa splendeur, dans toute sa saveur, ce n'est pas un beef pour mauviette, c'est un beef pour gauchos, pour l'homme de la Pampa avec toute sa rudesse et sa rusticité. Forte odeur de vache, transpiration des Hommes qui l'ont élevé, herbe des prairies humides buenos-airiennes... Il faut reconnaître aussi que le vin qui l'accompagne magnifie tout cela!

    Et tandis qu'à l'issue de cette expérience, je songe sérieusement à me convertir au végétarisme, je vois le visage déçu de l'Argentin qui m'accompagne. " Tu n'as pas aimé?? tu n'as mangé que les côtelettes et tu as laissé le meilleur... "
    Je me sens penaude de n'avoir pas apprécié... Je n'avais pas été informée de ces détails viscéraux auparavant et j'en déduis que mes papilles n'étaient encore prêtes à tant de remue-ménage. A croire que les Argentins ont un système digestif de fer car ce repas m'a nourri pour les deux jours suivants: impossible d'avaler autre chose! Serait-ce l'un des supers pouvoirs de la parrilla?

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  • Commentaires

    1
    Marlou
    Dimanche 22 Mars 2015 à 20:49

    Bonne digestion !

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